Les imaginaires de Marseille

Introduction

S’il est une ville qui suscite en France les imaginaires les plus forts, et les plus contrastés, les opinions les plus tranchées, de la passion à la haine, c’est assurément Marseille. Les guides de voyage, supports de rêves passés ou futurs, en témoignent encore aujourd’hui : « Deuxième ville de France, Marseille reste, d’un millénaire à l’autre, une immense scène de théâtre où les représentations se succèdent, sans temps morts. (…) Marseille est une ville étonnante dont les habitants ont des talents innés de comédiens et se moquent bien d’avoir des spectateurs complices, car ils jouent d’abord pour eux. Dans ces conditions, rejetez les idées toutes faites sur Marseille, celles que vous aviez en tête avant le lever du rideau. On daignera oublier que vous avez vidé toute votre voiture au parking, en jetant des regards inquiets, après avoir pesté contre les embouteillages, regardé d’un air effaré, depuis l’autoroute, le paysage gâché par des blocs de béton, alors que vous pensiez arriver au « Pays du soleil »… », lit-on dans l’édition 2010 du Guide du Routard.
Cette étonnante entrée en matière prétend pourfendre les principaux clichés sur Marseille (les origines millénaires, le Marseillais fort en gueule, à l’accent chantant, le soleil, Pagnol, le pastis, le savon, la sieste, mais aussi le crime, la saleté…), pourtant, elle les reprend allègrement, car sans elles, Marseille ne serait pas tout à fait elle-même. C’est aussi pour cela  que l’on vient à Marseille, et les auteurs du Routard le savent bien … Ils insisteront ensuite sur sa « beauté cachée », vanteront son cosmopolitisme, le charme de son urbanisation désorganisée, salueront les mérites culturels d’une ville en bouillonnement permanent, bref, croyant échapper à une liste de stéréotypes, tomberont inéluctablement dans une autre. Marseille est sans doute la ville de France à laquelle le mot « réputation » sied le mieux.
Tout comme les guides de voyage, les médias audiovisuels, dont nous avons ici analysé quelques exemples reprennent des clichés et stéréotypes qui se sont, pour la plupart, forgés au XIXe siècle, période qui focalisera l’essentiel de nos analyses.

Marseille est donc une ville suscitant les imaginaires, et dont l’identité, en retour, se nourrit de ces imaginaires, parfois jusqu’à la caricature. Les descriptions de ses habitants, de ses administrateurs ou des journalistes, parfois même des scientifiques, s’en inspirent, les reflètent ou les dénoncent, mais nul ne peut nier que l’imagination est une fonction structurante de l’identité marseillaise. Décliné ici en trois qualificatifs : sauvage, ouverte, criminelle, cet imaginaire complexe n’a de cesse d’enrichir cette identité, à la fois histoire et mémoire, depuis plusieurs siècles.

 

Introduction

I- Sauvage

II- Ouverte

III- Criminelle

Conclusion

Orientations bibliographiques

Résumé

S’il est une ville qui suscite en France les imaginaires les plus forts, et les plus contrastés, les opinions les plus tranchées, de la passion à la haine, c’est assurément Marseille. Les guides de voyage, supports de rêves passés ou futurs, en témoignent encore aujourd’hui : « Deuxième ville de France, Marseille reste, d’un millénaire à l’autre, une immense scène de théâtre où les représentations se succèdent, sans temps morts. (…) Marseille est une ville étonnante dont les habitants ont des talents innés de comédiens et se moquent bien d’avoir des spectateurs complices, car ils jouent d’abord pour eux. ...

Auteur

Regnard Céline
Maître de conférences en histoire contemporaine, Université d'Aix-Marseille, TELEMME, MMSH.