L’idée de construire un canal maritime en Égypte, reliant la mer Rouge à la mer Méditerranée par les branches du Nil, date du temps des pharaons. Senausert III, pharaon d'Egypte (1874 avant J-C.) était le premier à creuser un Canal. A cause de l'ensablement, le projet a été abandonné et repris plusieurs fois à différentes époques comme suit : Canal de Sity 1^er vers 1310 avant J-C., Canal de Nkhaw vers 610 avant J-C., Canal de Darius 1^er vers 510 avant J.C., Canal de Ptolémée II vers 285 avant J-C., Canal des Romains vers 117 après J-C, et Canal d'Amir El-Moemeneen vers 640 après J-C.

A l’époque moderne, dès 1798, les Français avaient envoyé lors de leur expédition en Égypte, plusieurs savants (Jacques-Marie Le Père) dont le but était d'étudier la possibilité de percer l'isthme de Suez. Les Saint-Simoniens (groupe adepte de la pensée de Claude Henri de Saint-Simon), avec l'aide de Linant de Bellefonds (ancien officier de marine et ingénieur en chef des travaux de la Haute Égypte) et plus tard avec celle de Ferdinand de Lesseps, avaient, dès les années 1820, envisagé la construction d'un canal maritime.

En 1846, les Saint- Simoniens fondent à l'initiative de leur chef Prosper Enfantin, une société d'études pour promouvoir ce projet. En 1847, Louis-Maurice Linant de Bellefonds, brillant ingénieur français au service de l'Egypte, réalise un dossier d'études technique sur la possibilité de percement de l'isthme. Un premier projet de Canal présenté aux Égyptiens en 1833 n’a pas retenu l'attention du vice-roi d'Égypte Méhémet Ali.

Un premier nivellement effectué lors des campagnes de Bonaparte avait en effet donné une nette différence d'altitude (une dizaine de mètres d'écart) entre la surface de la mer Rouge et de la Méditerranée. Cette différence était due à une erreur de triangulation survenue dans le rapport de Jacques-Marie Le Père. Le nouveau nivellement par Paul-Adrien Bourdaloue avait montré que cette différence était en réalité très faible et que la réalisation d'un canal sans écluse était envisageable.

 

Après d'incessantes démarches et de nombreux voyages, De Lesseps procède le 5 novembre 1858 à la constitution de la Compagnie Universelle du Canal Maritime de Suez, avec siège social à Alexandrie et siège administratif à Paris. Le 30 novembre 1854, le vice-roi d’Égypte a accordé à Ferdinand de Lesseps une concession de 99 ans, lui permettant de percer l’isthme de Suez créant une route maritime entre la Méditerranée et la mer Rouge. Il était prévu qu’à la fin de la concession, le Canal devienne propriété de l’Égypte.

Pour superviser le chantier et gérer les fonds, De Lesseps a créa la Compagnie universelle du Canal maritime de Suez qui, à partir des plans établis par Linant de Bellefonds et Alois Negrelli, entreprit la construction du Canal en 1859. Bien que le projet se soit heurté aux désaccords britanniques, il fut mené à son terme en 1869.

Les souscriptions de la construction du Canal furent proposées dans les principaux pays du monde et les actions se répartirent à l'origine comme suit : souscripteurs français 52% ; vice-roi d'Egypte 44% (qui furent vendues par la suite au gouvernement britannique); souscripteurs divers 4%. Il a été estimé que 1,5 million d'Égyptiens participèrent à la construction du Canal et que 125 000 moururent lors de son creusement, principalement du choléra.

Le 17 février 1867, le premier navire emprunte le Canal, mais l'inauguration officielle n’aura lieu que 17 novembre 1869 en présence de l'impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III, et de l'empereur d'Autriche François-Joseph. A son inauguration, le Canal de Suez mesurait 162 kilomètres de longueur, 54 mètres de largeur et 8 mètres de profondeur. Reliant la mer Rouge à la mer Méditerranée, il permet à Londres de rallier Bombay sans contourner le continent africain. Aussi, les Britanniques prendront ils le contrôle du Canal et le conserveront ils jusqu'à la nationalisation imposée par le président Gamal Abdel Nasser en 1956.

 

 

 

 

 

 

Disposant d’un certain nombre de droits sur les eaux adjacentes à ses côtes, et grâce à sa position géographique stratégique entre l’Afrique et l’Asie et entre la Méditerranée et la mer Rouge, l’Egypte a toujours joué un rôle principal dans le domaine de transport maritime grâce à son Canal de Suez.

La volonté de créer un espace et des projets autour de la Méditerranée illustre bien les enjeux économiques et géopolitiques. Les anglais, à titre d’exemple, s'opposaient à sa réalisation craignant, d’une part la domination française sur cette région qui se trouvait juste à un point stratégique sur la route des Indes, et d’autre part leur projet de construction d'une ligne ferroviaire égyptienne. Les Anglais parviendront à faire arrêter les travaux du Canal qui risquait de leur faire concurrence, à plusieurs reprises : une fois en octobre 1859 avec l'aide du ministre des finances de l'Empire ottoman, Mouktar Bey, et une autre fois à la mort de Saïd Pacha. La construction du Canal a pu néanmoins continuer grâce à l'intervention de Napoléon III. Cet épisode illustre les rivalités franco-britanniques sur cette région et prouve que ce canal était aussi construit pour différentes raisons et intérêts internationaux comme nationaux.

 

Le 29 octobre 1888, suite à la convention de Constantinople, l'Angleterre donne au canal de Suez un statut international permettant à tous les navires de l’emprunter sans exception, quelle que soit leur nationalité en temps de paix comme en temps de guerre. Mais la convention, étant garantie par l’Angleterre, ne sera pas toujours respectée dans les années suivantes, notamment lors des deux guerres mondiales.

Le 26 juillet 1956 Gamal Abdel Nasser annonce son intention de nationaliser le Canal de Suez et de geler tous les avoirs de la Compagnie universelle du Canal de Suez. Sa décision survient après le refus de la Grande-Bretagne et des États-Unis de participer au financement de la construction du Haut-Barrage. La décision du président provoque une crise internationale car la France et l'Angleterre perçoivent des droits de péage sur cette voie maritime.

 

 

Le 31 octobre 1956, la Grande-Bretagne et la France avec à Israël attaquent l'Égypte pour assurer le libre passage à travers le Canal de Suez. DOCUMENT « Cessez le feu en Egypte »

 

 

Le conflit prendra fin le 6 novembre sous la pression des Etats-Unis et de l'URSS. Après la guerre des six jours de 1967, le Canal reste fermé jusqu'en 1975, une force de maintien de la paix de l'ONU restant sur place jusqu'en 1974.

Le 13 octobre 1956, le Conseil de Sécurité des Nations Unis proposa à l’Egypte un compromis qui réaffirmait la liberté de passage sans discrimination directe ou indirecte à travers le Canal. Le 24 avril 1957, le gouvernement égyptien donna son accord au compromis. En juin 1975, le Canal a été ré-ouvert après une fermeture à cause de la guerre de 1967.

Il fallut toutefois attendre la signature, à Washington le 26 mars 1979, du traité de paix israélo-égyptien, pour que l’Egypte arrête d’interdire aux navires israéliens le passage à travers le Canal.