Méditerranée, patrimoine en danger

I. Le projet de complexe industriel à Fos-sur-Mer

Méditerranée, patrimoine en danger. La Méditerranée et l'écologie dans les actualités françaises

Dès les années 1960, la région marseillaise est touchée de plein fouet par la chute du commerce colonial. Pour faire face à la crise, elle doit s’ouvrir au transport maritime international. Or, le port de Marseille n’est pas adapté aux flottes commerciales qui préfèrent Gênes ou Rotterdam. Afin de sauvegarder et renforcer la prospérité économique de la région tout en freinant l'exode provincial vers la capitale, la création d’une zone industrielle apparaît comme indispensable. La délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité des régions (DATAR), créée en 1963, décide de jeter les bases d’un nouveau complexe industriel près de Marseille, à Fos-sur-Mer.

 
Le complexe de Fos repose sur l’idée de créer une zone d’ « industrie industrialisante », ce qui implique une construction en deux temps : d’abord, on y installe des industries lourdes pour, ensuite, y attirer les industries de transformation. Le chantier est colossal : 16 000 personnes sont employées pour construire les trois darses de 3 km de long et 600 mètres de large. Les premières usines ouvrent entre 1972 et 1974. Fos-sur-Mer devient alors le premier complexe industrialo-portuaire français avec 8400 hectares, dépassant Le Havre-Antifer et Dunkerque. Son ambition est claire : devenir l’ « Europort » du Sud et permettre à la France de jouer un rôle majeur dans le commerce maritime méditerranéen. Dans un pays en plein boom économique, où le trafic maritime passe de 150 millions de tonnes à près de 200 millions de tonnes entre 1965 et 1970, Fos-sur-Mer entre ainsi dans un schéma de développement économique national. Les zones industrialo-portuaires attirant les industries nécessitant d’importer des matières premières, le projet favorise l’implantation de grandes entreprises métallurgiques, sidérurgiques et chimiques telles que Solmer, Atochem ou bien Air liquide.
 
Dans la région même de Fos, les conséquences sont importantes. Le tonnage du trafic maritime marseillais augmente de près de 60 % entre 1965 et 1975, de nombreux emplois sont créés et les infrastructures routières de la région sont renforcées avec notamment l’ouverture de l’autoroute Paris-Lyon-Marseille en octobre 1970.
 
Mais dès le début du projet, des voix s'élèvent pour dénoncer la non-prise en compte de l’environnement. L'une des conséquences de la construction du complexe de Fos est en effet la pollution, liée aux émanations industrielles, à l’accumulation des déchets et à la raréfaction des espaces naturels. De fait, l’environnement change, les odeurs et les bruits liés à l’industrie apparaissent. Face à la crise du logement qui suit l’augmentation de la population, une urbanisation sauvage se développe. Mais en ce début des années 1970, l’environnement n’est pas la préoccupation principale de la DATAR qui s’en remet au bon-vouloir des entreprises pour régler la question. Dans son livre, La Damnation de Fos, Bernard Paillard dénonce la gestion du projet industrialo-portuaire et ses effets néfastes.
 
Tous ces aspects sont évoqués par ce reportage proposé lors du JT de 13 heures de l’ORTF, le 8 octobre 1970. Les premières images dévoilent en effet aux spectateurs un impressionnant bâtiment en béton : la tour vigie du port. Puis une carte apparaît, situant Fos-sur-Mer non pas dans une dimension nationale mais européenne. Le journaliste expose alors les faits et compare la puissante zone portuaire de l’Europe du Nord, Rotterdam, au prometteur complexe industrialo-portuaire de Fos. Pour ce faire, des moyens sans précédent sont mis en œuvre et le port jouira d’un grand espace équivalent à « la superficie de la ville de Paris », comme le témoigne la juxtaposition de la carte de la zone industrielle de Fos et de la ville de Paris. Le journaliste insiste sur la rapidité du projet, né en 1969, avec les premières usines sortant de terre en 1971. Un plan apparaît alors, montrant aux téléspectateurs l’emplacement de grandes usines dans le port. Le complexe amène à un développement des infrastructures. Le reportage montre une autoroute, tout en parlant d’une connexion avec l’Espagne et l’Italie mais aussi avec le Nord. Le journaliste fait également mention, appuyé par des vidéos, de pipelines et de voies fluviales. Enfin, il explique les retombées économiques d’un tel projet : la population doit doubler, il faudra investir dans les écoles, hôpitaux et autres infrastructures. Il termine par une réflexion sur les conséquences environnementales d’un tel complexe.
 

I. Le projet de complexe indust...

II. Méditerranée, mer morte dan...

III. Interdiction de la pêche a...

IV. Les calanques de Marseille,...

Bibliographie

Résumé

Dès les années 1960, la région marseillaise est touchée de plein fouet par la chute du commerce colonial. Pour faire face à la crise, elle doit s’ouvrir au transport maritime international. Or, le port de Marseille n’est pas adapté aux flottes commerciales qui préfèrent Gênes ou Rotterdam. Afin de sauvegarder et renforcer la prospérité économique de la région tout en freinant l'exode provincial vers la capitale, la création d’une zone industrielle apparaît comme indispensable. La délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité des régions (DATAR), créée en 1963, décide de jeter les bases d’un nouveau complexe industriel près de Marseille, à Fos-sur-Mer...

Auteur

Gasc Paul
Etudiant en master Études Européennes (Université Aix-Marseille).

Giraudon Laurent
Etudiant en master Études Européennes (Université Aix-Marseille).