Les septièmes Jeux méditerranéens d'Alger en 1975 |
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Titre de la collection
Collection EPTV
Date de première diffusion
05/09/1975
Résumé
Les septièmes Jeux méditerranéens ont été organisés du 23 août au 6 septembre 1975 à Alger, en Algérie.
La médaille d'or de football a été remportée par l'Algérie de Rachid Mekhloufi, menée par Djamal Keddou, Mokhtar Kaoua, Mehdi Serbah, devant l'équipe de France où brillaient Jean Fernandez, Omar Sahnoun, Castellani. C'était une grande performance de la part de l'équipe nationale au vu de la valeur des adversaires comme la France ou l’ex-Yougoslavie et l’Italie.
Par ailleurs, le mot "fennecs", surnom désignant l’équipe nationale de football, n’est autre que la mascotte des mêmes Jeux méditerranéens d’Alger de 1975. Le comité d’organisation avait choisi à l’époque ce petit animal du désert algérien pour symboliser cette manifestation
Chaîne de première diffusion
EPTV - 1st national channel
Forme audiovisuelle
Direct
Thème principal
Sport et jeux
Contexte
Les septièmes Jeux méditerranéens d'Alger en 1975
Stéphane Mourlane
Le match qui oppose la France à l’Algérie à Alger en finale des Jeux méditerranéens de 1975 dépasse le seul cadre sportif. La compétition en elle-même, fondée en 1951, se donne un objectif autant sportif que culturel : « Réunir des sportifs de culture et de religion différente mais qui se réclament de la même civilisation millénaire, fondue dans le creuset du bassin méditerranéen ». À Alexandrie en 1951, Barcelone en 1955, Beyrouth en 1959, Naples en 1963, Tunis en 1967 ou encore à Izmir en 1971, le contexte de Guerre froide ainsi que les fractures suscitées par les conflits de décolonisation empêchent cependant la pleine concrétisation de cet idéal méditerranéen que l’on retrouve à cette époque dans les milieux culturels et intellectuels. La participation d’Israël est ainsi rejetée par les pays arabes. En 1975, la question provoque un conflit ouvert entre le Comité olympique algérien et le Comité olympique international (CIO) qui chapeaute la compétition : face au refus algérien catégorique d’inviter Israël, le CIO refuse d’accorder l’appellation « Jeux méditerranéens » à la compétition qui prend alors le nom de « Jeux d’Alger ». Il n’en reste pas moins que les autorités algériennes investissent massivement dans l’organisation de la compétition. La construction du stade du 5 juillet où se déroule la finale du tournoi de football, tout comme celle du palais des sports de Mahieddine, doivent donner à voir l’œuvre de modernisation qu’à engagée le FLN au pouvoir en suivant le modèle socialiste. L’inspirateur de cette politique, le président Houari Boumediene, suit d’ailleurs de manière assidue les compétitions et marque de sa présence la finale de football dans un stade dont le nom rend hommage à l’indépendance du pays en 1962. Dans ces conditions, la confrontation avec l’ancienne puissance coloniale revêt une signification particulière. Depuis l’indépendance, les relations entre les deux pays restent étroites, en raison notamment d’une présence de l’immigration algérienne en France et de la politique de coopération menée par Paris, mais elles sont aussi fortement empreintes de ressentiments liés à la guerre d’indépendance.
« L’affaire Abada » lors des Jeux d’Alger en 1975 relance d’ailleurs les tensions entre les deux pays. De famille européenne algéroise, le perchiste Patrick Abada est pressé de se faire naturaliser par la Fédération algérienne d’athlétisme dans la perspective des Jeux tandis que Fédération française le sollicite également. Partagé entre les deux pays, Patrick Abada n’est pas en mesure de prendre une décision claire, ce qui l’empêche de participer à la compétition, suscitant une polémique diplomatique entre la France et l’Algérie pour déterminer quel pays il est censé représenter. Le climat est donc tendu au moment de la finale du tournoi de football qui prend un tour passionnel. Les 80 000 spectateurs, dont beaucoup brandissent le drapeau national, manifestent une grande ferveur, accrue par le scénario du match. L’équipe de France alignée à Alger n’est que l’équipe espoir ; la France ne manifestant que peu d’intérêt pour les Jeux méditerranéens depuis leur création. Si le football français ne rayonne guère sur la scène internationale, cette équipe comporte néanmoins des joueurs en devenir appelés par la suite à redorer le blason français, parmi lesquels figurent Michel Platini. Sur le plan sportif, la victoire des Fennecs est en rupture avec le net déséquilibre en faveur des pays de la rive nord lors des Jeux méditerranéens, quelle que soit la discipline. D’un point de vue symbolique, le succès de l’équipe, entraînée par la figure emblématique du « onze du FLN », Rachid Mekhloufi, apparaît comme une revanche face à l’ancienne métropole. Avant même la fin du match, on assiste à des scènes d’hystérie dans l’enceinte du stade du 5 juillet à tel point que la cérémonie de clôture doit être écourtée. Jusqu’à tard dans la nuit, une grande fête spontanée gagne toute la capitale algérienne : rues bloquées, concerts de klaxon. Le quotidien L’Equipe écrit lendemain : « Heureusement que l’Algérie a gagné sinon un malheur aurait marqué les Jeux ». La victoire française dans le tournoi de basket face au pays hôte se déroule du reste dans un climat agressif et hostile et s’achève par une bagarre générale : les Français ne doivent leur salut qu’à l’intervention de la police.
Le match France-Algérie témoigne bien des enjeux identitaires et politiques sous-jacents au football. Le ballon rond prend ici une forme cathartique et révèle une identité nationale algérienne forgée dans le rejet de la domination coloniale.
Bibliographie :
Gastaut Yvan, « Les Jeux méditerranéens, une diplomatie culturelle pendant la Guerre froide », in Teja Angela, Krüger Arnd et Riordan James (ed.), Sport e Culture/Sport and Cultures, Crotone, Edizioni del Convento, 2005.
Fatès Youssef, Sport et politique en Algérie, Paris, L’Harmattan, 2009, 346 p.
Mazot Jean-Paul, Laget Serge, Les Jeux méditerranéens, Montpellier, Presses du Languedoc, 1993, 326 p.