Les poésies d'Al-Abnoudy et d'Amal Donkol |
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Titre de la collection
Omsya sakafeya
Date de première diffusion
1991
Résumé
Un entretien avec le poète égyptien Abnoudy et le poète soudanais Amal Donkol. Ils évoquent leur travail.
Chaîne de première diffusion
ERTU - Channel 2
Forme audiovisuelle
Entretien
Personnalités
- Donkol Amal
- El-Abnoude Abdel-Rahman
Thème principal
Arts, cultures et savoirs
Thème secondaire
- Arts, cultures et savoirs / Langues et littératures
Générique
- Abnoudi Abderrahmane - Participant
- Donkol Amal - Participant
Lieux
- Egypte - Basse Egypte - Le Caire
Contexte
Les poésies d'Al-Abnoudy et d'Amal Donkol
Richard Jacquemond
Cette émission, diffusée peu après le décès d’Amal Dunqul (1940-1983), a été enregistrée un an auparavant, alors que le poète est déjà très affaibli par le cancer qui va l’emporter. Il est accompagné d’une autre voix majeure de la poésie égyptienne, ‘Abd al-Rahman al-Abnudi (né en 1938). Tous deux sont très proches : ils ont fait ensemble leurs débuts poétiques dans la région de Qena (Haute-Egypte), où leurs pères, lettrés et poètes eux-mêmes, se connaissaient déjà. Son bac en poche, Dunqul « monte » au Caire en 1958, où Abnudi le rejoint en 1962 et où ils partagent, avec Yahya al-Tahir Abdallah (1938-1981), autre grande figure de cette génération littéraire et lui aussi originaire de la région de Qena, la vie de bohème de la jeune avant-garde politico-littéraire égyptienne. Dunqul et Abnudi sont des poètes révoltés, de deux manières différentes, en opposition avec le régime, particulièrement sous la présidence d’Anouar El-Sadate, et cette émission enregistrée en 1982, au moment où son successeur Hosni Moubarak cherche à apaiser les conflits entre le régime et l’intelligentsia égyptienne, est probablement leur première apparition à la télévision publique égyptienne – et la dernière malheureusement pour Dunqul.
Dunqul et Abnudi sont des acteurs majeurs, en Egypte, de la révolution poétique moderniste, mais de deux manières et dans deux domaines différents : Dunqul s’exprime en arabe littéraire (fusha), quand Abnudi utilise l’arabe parlé, plus particulièrement le dialecte de Haute-Egypte. La « poésie libre » (al-shi‘r al-hurr) née en Irak à la fin des années 1940 rompt avec le cadre prosodique de la poésie arabe traditionnelle fait très vite des émules en Egypte. Parmi eux, Amal Dunqul s’impose avec une série de recueils publiés à partir de 1969, marqués par l’engagement politique et par un travail original sur la langue, très moderne en même temps que chargée de références au patrimoine, qui lui vaudront la double reconnaissance de la critique et d’un large public, en dépit des obstacles mis à sa diffusion par le régime de Sadate. La « poésie dialectale » (shi‘r al-‘ammiyya) dont Abnudi est une voix majeure est l’équivalent, dans le domaine dialectal, de ce qu’est la « poésie libre » dans le domaine de l’arabe littéraire : toutes deux représentent une révolution esthétique et politique par rapport à la poésie traditionnelle dans leurs domaines respectifs (shi‘r ‘amudi pour l’arabe littéraire, zajal pour l’arabe dialectal).
Plus encore que la poésie libre, la poésie dialectale a été combattue par l’establishment littéraire arabe parce qu’elle s’exprime dans la langue parlée, fortement dévalorisée par la culture officielle. Comme on le voit ici néanmoins, c’est une version très élaborée du dialecte, fidèle à sa syntaxe et à sa phonétique, mais au lexique très soutenu, ce qui la rend accessible à un large public, au-delà du parler du Sud de l’Egypte dans lequel elle s’exprime. Par la suite, Abnudi élargira encore son public en écrivant les textes de nombreuses chansons et en faisant connaître, à la radio égyptienne, la geste hilalienne (sirat Bani Hilal), un des fleurons de la littérature orale du Sud de l’Egypte et, au-delà, de toute l’Afrique du Nord.
Bibliographie
‘Abla al-Ruwaynî, Amal Dunqul, al-Janûbî (A.D., le Méridional), Le Caire et Koweït, Dâr Su‘âd al-Sabbâh, 1992
Richard Jacquemond, Entre scribes et écrivains. Le champ littéraire dans l’Egypte contemporaine, Arles, Actes Sud/Sindbad, 2003