Le port de Marseille filmé en 1959 |
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Titre de la collection
Dimanche en France
Date de première diffusion
29/03/1959
Résumé
Séquence sur l'activité du port de Marseille filmée en 1959, illustrée en off par le texte d'Albert Londres '' Marseille, porte du Sud '' (1927).
Sociétés de production
-
Office national de radiodiffusion télévision française - Production propre
Chaîne de première diffusion
ORTF
Forme audiovisuelle
Magazine
Thème principal
Grands ports
Thème secondaire
- Economie / Echanges commerciaux
Générique
- Leclerc Max - Réalisateur
Lieux
- France - Sud Est - Marseille
Langue d'origine
Français
Contexte
Le port de Marseille filmé en 1959
Céline Regnard
La fortune de Marseille s’inscrit depuis l’Antiquité dans une tradition de commerce et de négoce. Au XVIIIe siècle le Vieux-Port accueille des bateaux qui approvisionnent Marseille - et par delà le royaume- de marchandises venues du Levant (blé et céréales) mais aussi d’Extrême Orient (étoffes et épices). À ce commerce florissant s’adosse une industrie de transformation des matières premières : les huiles sont utilisées dans la fabrication du savon, les étoffes dans l’industrie textile, le sucre dans celle du raffinage. Le « système marseillais » repose sur une articulation du commerce et de l’industrie, le tout étant facilité par un groupe de négociants et d’industriels actif et la présence d’une main-d’œuvre abondante.
L’essor des échanges commerciaux, qui s’appuie très largement sur la conquête coloniale débutant en Algérie en 1830 – qui se poursuit tout au long du XIXe siècle avec une accélération après le percement du Canal de Suez en 1869- entraîne un envol industriel. De cette double conjoncture naissent le port de la Joliette et l’ensemble des docks et industries qui le jouxtent. En effet, malgré les quelques travaux d’approfondissement et d’élargissement entre 1819 et 1827 puis entre 1839 et 1844, le Vieux-Port apparaît saturé : le tonnage de 1842 vaut près de trois fois celui de 1816. La loi du 5 août 1844 ordonne la création du port de la Joliette. Cet important ouvrage nécessite 9 longues années de travaux et transforme complètement le littoral Nord de Marseille. Un nouveau bassin de 20 hectares et 10 mètres de fond est pris sur la mer, on l’isole par une jetée à 400 mètres du rivage. Le bassin de la Joliette, à peine achevé en 1853, est déjà insuffisant. Il est complété, sur le même modèle, par la création des deux autres bassins : le Lazaret et Arenc, dont la construction est décidée en 1854 et 1856. On construit également un dock d’entrepôt que gèrent deux sociétés : la Compagnie des docks et des entrepôts et la Société des ports. L’essor commercial nécessite encore la construction du bassin Napoléon dit plus tard de la gare maritime, puis du bassin Impérial, aujourd’hui National, et enfin du Radoub. En 1914 ce sont 77 nouveaux hectares qui ont été ajoutés aux 48 hectares du Vieux-Port et de la Joliette.
A l’apogée de l’Empire colonial français, dans la première moitié du XXe siècle, le port de Marseille est donc le premier de Méditerranée, et le plus important de France. Quantité de marchandises venues des quatre coins du monde y sont déchargées, et, pour beaucoup, sont transformées dans les industries marseillaises fabricant pâtes alimentaires, sucre, corps gras ou savon. Ces produits sont ensuite réexpédiés outre-mer ou acheminés par voie ferrée sur l’ensemble du territoire national. Les quais voient aussi s’amonceler toutes les marchandises exotiques dont les consommateurs sont friands (épices, cuirs, rhum, fruits, légumes etc.). La crise de ces industries traditionnelles, l’émergence d’une concurrence agressive d’autres ports ainsi que la décolonisation sonneront, dans les années 1960, le début du déclin.
Car c’est bien d’une époque révolue mais que beaucoup considèrent comme la grande époque du port de Marseille dont il s’agit. Les descriptions de cette activité respirent d’ailleurs la fierté d’un des premiers empires coloniaux et le goût pour un exotisme teinté de mystère. Le mélange d’odeurs, de couleurs, de saveurs, l’évocation de ce « grand bazar » convoque des rêves d’orient. Marseille est bien la « Porte du Sud », selon l’expression du grand reporter Albert Londres en 1927. Elle est une cité du travail, et non pas une ville de touristes. En témoigne la présence de nombreux dockers, dont le statut, dans les années 1950 reste envié. En effet, si leurs conditions de travail étaient difficiles – embauche journalière et faible salaire – à la fin du XIXe siècle, la création de l’Union syndicale des ouvriers de ports et docks en 1902 ouvre la voie à des grèves et à l’obtention de meilleures conditions de travail. L’essor du port de Marseille leur garantit en outre un emploi et fait de cette profession une branche emblématique du monde ouvrier marseillais jusqu’à aujourd’hui.
Bibliographie :
Gaston Rambert, Marseille, La formation d’une grande cité moderne. Étude de géographie urbaine, Marseille, Société anonyme du sémaphore de Marseille, 1934
Bertrand Régis, Le vieux port de Marseille, Marseille, Jeanne Laffitte, 1998
Raveux Olivier, Daumalin Xavier, Girard Nicole (dir.), Du savon à la puce. L’industrie marseillaise du XVIIème siècle à nos jours, Marseille, Jeanne Laffitte, 2003
Domenicho Jean, Guillon Jean-Marie, Les Dockers, Jeanne Lafitte, Marseille, 2001