Obtenir le divorce en 1969 |
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Titre de la collection
Correva l'anno
Date de première diffusion
05/05/2008
Résumé
Le documentaire évoque le rôle éminent joué par le député socialiste Loris Fortuna concernant la réforme de la loi sur la famille, qui a commencé par la proposition de réforme du divorce en 1969.
Le documentaire comporte également des commentaires sur la position du Vatican.
Chaîne de première diffusion
RAI - RAI Tre
Forme audiovisuelle
Montage d'archives
Thème principal
Familles et parentés
Thème secondaire
- Enjeux historiques contemporains XIXe-XXIe s.
Contexte
Divorce en 1969
Stéphane Mourlane
La question de la dissolution des liens matrimoniaux est une préoccupation politique depuis l’Unité italienne. La première proposition de loi est à l’initiative en 1878 de Salvatore Morelli, auteur d’un ouvrage en 1862 (La Donna e la scienza o la soluzione del problema sociale) qui préfigure l’émancipation féminine. Ce projet, comme d’autres par la suite, est repoussé. Le concordat de 1929, qui reconnaît au mariage religieux des effets civils, renforce le caractère indissoluble des liens matrimoniaux. La société italienne, rurale et conservatrice, où l’Église dispose d’une forte influence et où, dans les régions méridionales, subsistent des structures sociales et mentales archaïques, s’accommode alors fort bien de cette situation. Le mariage assure la pérennisation d’un modèle familial, forme structurante de la société italienne, au sein duquel la femme est assujettie à l’autorité de son mari. La figure de la Mamma est l’un des stéréotypes les plus symboliques de l’importance des liens familiaux au sein de la société italienne. La littérature comme le cinéma ont largement contribué à en définir les caractères : la Mamma affiche des formes généreuses, à la fois témoignage et symbole de la maternité, et elle trouve dans les activités domestiques sa principale fonction sociale. En 1955, les instructions officielles de l’enseignement primaire insistent sur la valorisation des différences sexuelles, avec pour objectif implicite de former au mieux les jeunes filles à leurs futures tâches ménagères. De fait, la question du divorce est étroitement liée au lent processus d’émancipation féminine depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Sur le plan politique, les femmes disposent du droit de vote depuis 1945, il faut attendre 1956 pour qu’elles puissent être admises dans un jury de cour d’assise. Au sein de la famille, ce n’est qu’en 1968 qu’est abrogé l’article du code Rocco adopté à l’époque fasciste qui pénalise l’adultère des femmes.
Les années 1960 offrent un contexte plus favorable à un nouveau débat sur la légalisation du divorce. La société italienne, sous l’effet du miracle économique, connaît d’importantes transformations dont les femmes tirent profit du point de vue social et culturel. Ainsi, leur part dans l’enseignement supérieur passe de 27% à 38% entre 1960 et 1970. Elles participent à l’affirmation d’une génération en rupture avec les cadres sociaux et politiques conservateurs aboutissant à des mouvements de contestation entre 1967 et 1968. Les enquêtes dans la presse et les sondages témoignent de leur volonté de voir la condition féminine évoluer, notamment par l’adoption d’une législation sur le divorce.
Dans ce contexte, marqué aussi par le déclin progressif de l’Église, le député socialiste Loris Fortuna dépose en 1965 un projet de loi auquel n’est pas donné de suite immédiatement. À la suite d’une importante campagne dans l’opinion, il s’associe au député libéral Antonio Baslini pour faire une nouvelle proposition en 1969. La loi est adoptée par la chambre des députés le 27 novembre 1969 par 325 voix contre 283 puis le 9 octobre par le sénat dans les mêmes proportions. Les élus démocrates-chrétiens s’y opposent, sous la pression de l’Église, qui voit dans la légalisation du divorce une entorse aux accords du Latran.
L’Eglise réclame et obtient l’organisation d’un référendum en vue d’une abrogation en mai 1974. En dépit d’une campagne très active soutenue par la Démocratie chrétienne, seuls 40 % des Italiens se prononcent en faveur de l’interdiction du divorce. La légalisation du divorce constitue donc en Italie un tournant dans l’évolution sociale du pays, marquant une avancée conséquente de l’émancipation féminine et une autonomisation des acteurs sociaux de la tutelle de l’Église. Symbole des pesanteurs culturelles et juridiques, le taux de divortialité n’en demeure pas moins depuis à un niveau exceptionnellement bas en Europe.
Bibliographie :
Michela De Giogio, Le Italiane dall’Unità ad oggi, Roma-Bari, Laterza, 1997.
Diana De Vigili,
La battaglia sul divorzio. Dalla Costituente al Referendum, Milano, Franco Angeli, 2000. Giambattista Scirè -
Il divorzio in Italia. Partiti, Chiesa, società civile dalla legge al Referendum, Milano, Bruno Mondadori, 2007