Archéologie, télévision et pouvoirs en Méditerranée

Introduction

Archéologie et pouvoirs n’on jamais cessé, depuis les tout premiers temps de celle-ci, d’entretenir les relations les plus étroites. Au point qu’il est impossible d’écrire l’histoire de la première sans étudier dans le même temps le contexte politique et économique de son développement. La Méditerranée représente ici une aire de recherche privilégiée. Non seulement parce que c’est à l’historien athénien Thucydide que l’on doit l’un des tout premiers raisonnements archéologiques, au livre I de la Guerre du Péloponnèse, mais aussi parce que cette mer partagée demeure aujourd’hui encore un espace riche en vestiges de tout type, de tout milieu et de toute époque. Ils sont souvent les marqueurs les plus spectaculaires des sociétés qui se sont succédé et parfois combattu sur les mêmes terres et les mêmes mers au fil des millénaires. Ils représentent aussi un enjeu capital pour ceux qui en ont la charge, à l’échelle régionale, nationale ou internationale. L’archéologie est, c’est un fait, trop souvent investie d’une mission qui n’est pas la sienne : fournir à son commanditaire les arguments que ce dernier réclame. Sous peine de ne pas être financée.
Dans cette relation complexe et déséquilibrée entre ses différents acteurs, la télévision joue, depuis la seconde moitié du XXe s., un rôle d’une ampleur inédite jusque là et pour trois raisons : la dimension spectaculaire qu’elle donne aux sujets archéologiques, découvertes, fouilles et expositions ; le nombre exceptionnel de spectateurs potentiels ; ses caractéristiques techniques mêmes et ses modes de diffusion : à l’heure souhaitée par le commanditaire ; sous le format qu’il désire ; à son rythme. Affranchie des contraintes de format ou de rythme propres au cinéma ou aux médias papiers, cette archéologie télévisuelle vit peut-être, cependant, ses dernières heures, confronté au succès d’internet ces toutes dernières années. C’est ici l’occasion de dégager les lignes de force de plus d’un demi-siècle de discours, au succès est toujours allé croissant. Auprès du public, bien sûr, mais aussi auprès de ses commanditaires politiques. Ceux-ci ont été et demeurent aujourd’hui de plusieurs types, qu’ils s’agissent des instances internationales productrices de leurs propres documentaires, telle l’Unesco ou des télévisions nationales et régionales, de part et d’autre de la Méditerranée. Les archives de l’INA sont une occasion exceptionnelle de confronter ces discours, d’en étudier les formes et leur évolution, notamment dans le contexte très particulier de la décolonisation des pays de la rive sud. Comment, par exemple, les nations décolonisées ont-elles géré depuis leur indépendance les vestiges de leur sol, mis au jour, le plus souvent, par les puissances coloniales ? Comment les mêmes vestiges, de la même époque, rattachée à une seule même civilisation (Rome, souvent), ont-ils été présentés, avant et après l’indépendance de pays tels que l’Algérie, la Tunisie ou le Maroc ? La notion de patrimoine, qui finit aujourd’hui par se confondre avec l’objet même de l’archéologie, joue-t-elle un rôle dans la mise en images de celle-ci à la télévision ? Substitue-t-elle à son objet scientifique ses enjeux touristiques et politiques ? Quelle traduction la pression de l’économie touristique trouve-t-elle dans le discours archéologique télévisuel ? La télévision est assurément l’un des meilleurs moyens d’écrire l’histoire de l’archéologie de ces soixante dernières années.

Introduction

I. Présences étrangères et arch...

II. Reprises en mains nationale...

III. Conflits de pouvoirs : arc...

IV. Enjeux de pouvoirs : anasty...

Conclusion

Orientation bibliographique

Résumé

Archéologie et pouvoirs n’on jamais cessé, depuis les tout premiers temps de celle-ci, d’entretenir les relations les plus étroites. Au point qu’il est impossible d’écrire l’histoire de la première sans étudier dans le même temps le contexte politique et économique de son développement. La Méditerranée représente ici une aire de recherche privilégiée. Non seulement parce que c’est à l’historien athénien Thucydide que l’on doit l’un des tout premiers raisonnements archéologiques, au livre I de la Guerre du Péloponnèse, mais aussi parce que cette mer partagée demeure aujourd’hui encore un espace riche en vestiges de tout type, de tout milieu et de toute époque...

Auteur

Jockey Philippe
Professeur des universités en histoire et civilisation grecques, Université Aix-Marseille, TELEMME, MMSH