La Corse : l'azziminu |
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Titre de la collection
La cuisine du soleil
Date de première diffusion
13/10/1981
Résumé
En Corse, "l'azziminu" c'est la bouillabaisse. Il faut donc une belle truite par personne, de l'huile d'olive, des tomates, de la marjolaine, du vin blanc, de l'ail, des petits piments et du pain de campagne.
Sociétés de production
-
France Régions 3 - Production propre
Chaîne de première diffusion
FTV - F3
Forme audiovisuelle
Magazine
Thème principal
Traditions culinaires
Générique
- Robin Claude - Présentateur
- Ordines Jacques - Réalisateur
Langue d'origine
Français
Contexte
La Corse : l'azziminu
Mayalen Zubillaga
L'aziminu est la variante corse de la bouillabaisse, fameuse soupe « retour de pêche » que l'on trouve sur l'ensemble du littoral provençal et que l'on associe surtout à la ville de Marseille. On le prépare le plus souvent avec des poissons de mer, cuits dans un bouillon riche en épices et herbes aromatiques. La recette n'a jamais été codifiée, d'autant moins que les variantes sont nombreuses en fonction des ports, mais il est communément admis que les Corses aiment l'aziminu quand il est riche et qu'il comprend de nombreux poissons, coquillages et crustacés toujours très frais. Contrairement à la bouillabaisse marseillaise, l'aziminu ne comprend pas obligatoirement du safran (même si cela reste fréquent), mais le fenouil frais est indispensable en guise de parfum (hors saison, celui-ci est couramment remplacé par du pastis, une boisson alcoolisée aux plantes anisées).
Ici, pourtant, la recette est préparée avec des truites. Il existe en effet, en Corse, une version spécifique de bouillabaisse-aziminu aux poissons d'eau douce. Ceux-ci, généralement des truites et des anguilles, sont pêchés dans les nombreuses rivières de cette « montagne au milieu de la mer », selon l'expression du géographe Frédéric Ratzel. Comme dans toutes les sociétés rurales traditionnelles, la quête de nourriture a été pendant longtemps l'une des principales préoccupations de la population corse. Plusieurs siècles durant, les famines ont régulièrement ravagé les campagnes, l'insularité renforçant les difficultés d'approvisionnement.
Jusqu'aux premières années du XXe siècle, la société paysanne corse se nourrissait ainsi, en priorité, des produits de l'exploitation familiale et de l'espace sauvage, tout en pratiquant le troc et l'achat d'autres ingrédients. Chasse et pêche fournissaient, au fil des saisons, des compléments bienvenus à une alimentation fruste et faiblement carnée. De fait, les poissons des rivières ont pendant longtemps amélioré le régime alimentaire quotidien des campagnards et des bergers, notamment dans les zones montagneuses de l'île. La cuisinière qui prépare l'aziminu, dans cet extrait, est d'ailleurs originaire de Corte. Cette ville, située dans le centre rude et montagneux de l'île, a donné son nom à l' « aziminu di Corti », recette dans laquelle les truites cuisent dans une sauce au vin, aux piments et aux herbes aromatiques.
Traditionnellement, les truites étaient pêchées à la main, à la fourche, à la ligne ou avec des filets. Elles étaient souvent cuites sur des pierres plates chauffées au feu. Quant aux anguilles, on les capturait soit avec des fagots dans lesquels de la viande avariée étaient déposée afin de les attirer et les emprisonner, soit avec des vers de terre enfilés le long d'une corde fine. Une autre technique de pêche en eau douce consistait à utiliser les propriétés naturelles du daphné garou (« u patellu ») : les racines toxiques de cette plante sauvage, écrasées ou préparées en décoction, permettaient de paralyser les poissons des rivières et de les attraper facilement. La plante a été ensuite remplacée par de l'eau de javel et par une technique de pêche électrique (« pêche à la dynamo »), avec des conséquences désastreuses pour la faune des rivières.
Ainsi, alors que la cuisine corse et ses spécialités sont souvent présentées comme uniformes à l'extérieur de l'île, il existe de nombreuses identités locales, micro-régionales et parfois villageoises, liées à la géographie extraordinairement variée de cet espace insulaire.
Bibliographie :
CONSEIL NATIONAL DES ARTS CULINAIRES, L’inventaire du patrimoine culinaire de la France. Corse, Produits du terroir et recettes traditionnelles, Albin Michel, 1996.
Ricciardi-Bartoli Félicienne, Cahiers d’ethnologie corse, « Cuisine et alimentation », CRDP de Corse, 1992.
Ricciardi-Bartoli Félicienne, Cuisine corse de A à Z, C. Bonneton 1995.